Bimbu la montre plaisirs des frères Magada

Source : Watch Around, été 2023



C’est une nouvelle marque. Mais une montre de maturité : Aldo Magada a quatre bonnes décennies de brand management derrière lui, et son frère Mario est collectionneur depuis au moins autant de temps.

Il n’est jamais exclu que l’on réussisse. Ces mots du père résonnent comme un absolu, légers et profonds, sérieux et distants. Ainsi vogue-t-on sur la grande mer de la vie chez les Magada. Vu de l’industrie qui nous concerne, on connaît surtout le grand frère, Aldo Magada. Son parcours est un menu complet de la gastronomie horlogère des quarante dernières années, tous les postes et tous les segments confondus : Omega, Piaget, Ebel, Gucci, Technomarine, Reuge, Badollet, Breitling, Zenith, Anonimo, Vulcain (Watch Around 36) ; direction produit, communication, marketing, vente, management. Un profil « considéré comme instable à l’époque », tempère Aldo Magada. Un parcours, complète-t-il, porté par la passion du produit : « Nous aimons tous l’horlogerie dans la famille. »

À un pas du seuil de la retraite, Aldo Magada a laissé cet amour de la montre être le plus fort. Avec son frère, Mario Magada, 62 ans, ils ont décidé de lancer leurs propres produits, des montres qui leur ressemblent (Mario Magada est collectionneur de montres), qui portent leurs valeurs et affichent clairement « tout ce qu’ils ont envie d’éviter ». La liste des choses à éviter est assez longue et va dans le détail si l’on creuse un peu, mais pour la grande ligne, il s’agit de ne surtout pas faire de copie, pas de néovintage, pas de pseudo haut de gamme.

L’idée de départ est de penser le produit par la base, « en partant des fournisseurs avec qui on se sent le plus à l’aise », un peu à la manière d’un « comptoir horloger du XIXe siècle ». Avec un but en forme de profession de foi : avoir et donner du plaisir. La démarche est simple, conclut Aldo Magada, soulignant que la simplicité est une sophistication en soi.

Ce comptoir horloger est déjà au complet, à quelques détails près, et les choix des entreprises sont avant tout dictés par les personnes. Le calibre est historique : Peseux 7001, petite seconde, remontage manuel, avec terminaisons personnalisées, réalisées par Concepto. Les cadrans, en pierre fine, seront exécutés par GT Cadrans, avec cette indication : il y aura toujours un cadran pierre et un rappel de la pierre sur le dos de la montre. L’habillage, boîtier et bracelet métal, sera l’affaire d’AB Concept. Le dessin est signé Edge Design, l’atelier du duo Fabrice Gonet et Olivier Leu. « De vrais designers dont les créations correspondent au brief », précise Aldo Magada, qui préfère à ce stade décrire la montre plutôt que diffuser des images de synthèse froides et désincarnées : « Le design est simple, mais particulier, pas inspiré par ce qu’il y a sur le marché et le plus fin possible. » Il évoque une épaisseur finale de 7,5 ou 8 mm, pour un diamètre de 39. Avec cette précision : « La montre n’est pas genrée. Le but est d’effacer cette frontière. »

La distribution se fera en direct. La communication sera mixte, un peu de digital, surtout du physique, rencontres, événements, « parce que nous sommes de cette génération-là ». Le contact direct et personnel fait intimement partie du projet : « Si l’on veut être authentiques et cohérents, il faut aller jusqu’au bout de la démarche. » Et c’est réaliste, souligne ce grand routard de l’horlogerie qu’est Aldo Magada, parce qu’il est question de séries de quelques centaines de pièces.

Le positionnement prix n’est pas encore fixé, mais se situe a priori entre 8 000 et 10 000 francs, sur une base de production 100 % suisse et arc jurassien : « Même notre banque est à Morges. » Plus qu’une posture, un engagement : « Notre manière de nous montrer responsables. »

Côté calendrier, l’objectif est de commencer à communiquer cet automne et de présenter la montre dès février prochain.

Le nom maintenant : Bimbu – prononcez « Bimbou ». Plus qu’une marque, un emblème. C’est comme ça que les deux frères s’appellent entre eux, depuis toujours, et dans ces deux syllabes, c’est toute leur histoire, leurs personnalités et leurs envies qui résonnent : « Nous ne voulions pas faire une montre Magada. Pas d’égo trip. Nous voulions un nom qui nous corresponde, qui raconte nos racines et notre envie de partager. » Pour ne rien perdre des racines, le premier modèle se nommera Duno, nom du hameau d’origine de la famille Magada, en Lombardie, d’où l’arrière-grand-père est parti pour rejoindre la Suisse.

Pour ce qui est du business plan, pas de pitch poli façon jeune pousse – « L’horlogerie n’est pas un secteur de startup » –, juste une expression de vieux renard alpha – en deux mots, le premier est en quatre lettres, le second est « couteau » –, avec la modestie de l’autofinancement – pas de gras dans les dépenses – et la pointe de sagesse ironique empruntée au père : « Il n’est jamais exclu que l’on réussisse. » Avec une certitude, il n’est pas question de faire de concession, « storytelling, storyliving et autre bla-bla ». « Tout sur le produit », clôt Aldo Magada, qui cite encore son frère en guise de conclusion : « Au pire, on aura fait de belles montres pour nous. » | SG

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